« être sans destin » de Imre KERSTEZ

                         ou S’ADAPTER PAS à PAS

       

« S’il y a un destin, la liberté n’est pas possible…

Si la liberté existe, il n’y a pas de destin… ou alors nous sommes nous-mêmes le destin ». IMRE KERTESZ

Imre Kertész est l’auteur du livre « Être sans destin ». Il obtient en 2002 le prix Nobel de littérature, « pour une œuvre qui dresse l’expérience fragile de l’individu contre l’arbitraire barbare de l’histoire ».

En 1944, à 15 ans, il est déporté à Auschwitz puis à Buchenwald.

Dans ce roman, il raconte « la vie d’un adolescent qui a vécu le cauchemar d’un temps arrêté et répétitif, victime tant de l’horreur concentrationnaire que de l’instinct de survie qui lui fit composer avec l’inacceptable ».

                                               ***********

Gyurka 14 ans vit à Budapest dans une famille modeste, juive non pratiquante. Comme tous les garçons de son âge, il va au lycée, chahute avec ses copains, porte l’étoile jaune, mène une vie relativement insouciante.

Au printemps 1944, son père, marchand de bois, est réquisitionné pour le travail obligatoire.

Deux mois plus tard, pendant l’été, il est aussi astreint au travail. Trop jeune, il ne peut être considéré comme travailleur aussi est-il envoyé dans une usine « Raffineries de pétrole Shell ». Il jouit d’une espèce privilège puisque grâce sa carte d’identité munie du cachet de la direction de l’armement, il peut franchir la barrière de sa petite ville. « Quant au travail, on ne peut pas dire qu’il soit très fatigant, et avec les copains, c’est même assez amusant ».

Quelques temps après, c’est là que c’est arrivé, « l’autobus a freiné brusquement, puis j’ai entendu des ordres de l’extérieur…. S’il y avait des juifs dans le véhicule, ils devaient descendre. »

C’est arrivé dans une sorte de tourbillon, de vertige unique…des pas, tout le monde avançait pas à pas, tant que c’était possible.

Dans les trains, au camp, il fallait s’adapter, « il n’y avait aucune absurdité qu’on puisse vivre tout naturellement, que l’on continue à vivre une vie invivable ».

Qu’aurions-nous pu faire ? RIEN, n’importe quoi, ce qui aurait été aussi insensé que le fait que nous n’avons rien fait, de nouveau et toujours tout naturellement… « il y a seulement des situations données et les nouvelles possibilités qu’elles renferment… ».

Auschwitz, Buchenwald puis ZEITZ où « il comprit que la captivité a aussi ses jours ordinaires, et même que la véritable captivité se compose en fait exclusivement de grisaille quotidienne ».

                                      *******************

C’est cette écriture distancée qui m’a le plus impressionnée, à la limite mise « mal à l’aise » mais au fil de ma lecture c’est imposé l’idée, qu’outre le caractère exceptionnellement violent, insupportable dans son inhumanité, inimaginable ; cette situation perdure aujourd’hui tout autour de la planète (camps de réfugiés en Lybie, camps de concentrations en Chine, en Russie etc…).

De plus, ne sommes-nous pas individuellement prisonniers de notre éducation, du milieu où nous vivons, de nos habitudes, de nos tabous,de notre morale religieuse ou pas, de l’époque que nous traversons, des informations que l’on nous distille chaque jour via les médias, les réseaux sociaux… j’en passe…

Sommes-nous libres ? ou n’avançons-nous pas comme tous les humains PAS à PAS pour survivre.


Laisser un commentaire